
La proposition choc du Premier ministre François Bayrou de sabrer deux jours fériés, à savoir le lundi de Pâques et le 8-Mai, provoque un tollé général et révèle les profondes fissures d’une République laïque en pleine crise d’identité. Alors que les aides aux entreprises dépassent les 200 milliards d’euros sans évaluation rigoureuse, la décision de faire travailler les Français davantage, et ce, sans compensation salariale, est perçue comme une injustice flagrante. Une mesure qui, selon les syndicats, ne ferait qu’aggraver la précarité des travailleurs.
Les arguments avancés par le gouvernement pour justifier cette attaque frontale contre le temps libre des citoyens sont déconcertants. Le lundi de Pâques, dépourvu de « signification religieuse » selon Bayrou, et le mois de mai, qualifié de « gruyère » en raison de ses ponts, sont des prétextes qui masquent mal une tentative de démantèlement du calendrier traditionnel français. Une telle approche « à la hussarde » bafoue l’héritage historique et symbolique d’une nation qui a vu ses jours fériés évoluer au gré des régimes politiques, de l’Ancien Régime à la IIIe République.
Historiquement, la Révolution avait déjà tenté de balayer les fêtes religieuses pour imposer un calendrier laïque, une expérience qui s’était soldée par un échec. Napoléon avait ensuite rétabli les célébrations catholiques, reconnaissant leur importance culturelle. La IIIe République elle-même, malgré son anticléricalisme, avait maintenu des jours fériés à connotation catholique, soulignant la complexité de la laïcité française. Aujourd’hui, cette décision arbitraire soulève des questions sur la véritable définition de la laïcité et l’égalité entre les citoyens. L’absence d’une convention citoyenne pour un débat apaisé sur ce sujet crucial est un échec démocratique retentissant.
Cette initiative, loin de résoudre les problèmes économiques du pays, risque de fracturer davantage une société déjà sous tension. L’impact sur le tourisme est déjà estimé à des centaines de millions d’euros, et la colère gronde parmi les citoyens qui se sentent méprisés. La suppression des jours fériés n’est pas une solution miracle, mais un aveu d’impuissance face aux défis économiques, qui révèle une approche dogmatique et déconnectée des réalités sociales.