
Deux ans après une première sonnette d’alarme, de nouveaux travaux de recherche révèlent l’ampleur d’un malaise professionnel persistant en France. L’ouvrage « Travailler mieux » met en lumière l’incapacité du pays à offrir un emploi de qualité, pointant du doigt un modèle de management archaïque et ses conséquences dévastatrices sur le bien-être des travailleurs. Loin de la « grande démission » américaine, la France expérimente une « grande déception », où l’attachement au travail côtoie une profonde insatisfaction.
Ce paradoxe, expliquent les chercheurs Christine Erhel et Bruno Palier, est le symptôme d’un profond déséquilibre. Les salariés français, malgré leurs attentes élevées, se heurtent à une réalité où l’écoute et la reconnaissance sont quasiment absentes. Le sentiment d’être ignoré au travail se traduit par une perte de sens généralisée, générant un malaise social aux répercussions politiques alarmantes. Bruno Palier établit un lien direct entre le manque d’écoute en entreprise et la montée des votes extrémistes, soulignant que le coût social d’un mauvais management est bien plus élevé qu’on ne l’imagine.
Les chiffres ne mentent pas : la France enregistre un nombre alarmant d’arrêts maladie liés au travail et un taux de mortalité professionnelle deux fois supérieur à la moyenne européenne. Ces données accablantes confirment que la faible qualité du travail est une spécificité française, distincte de celle de ses voisins européens pourtant comparables en termes de richesse. L’enquête européenne sur les conditions de travail corrobore ces observations, révélant une pénibilité accrue, des horaires contraignants et une écoute inexistante. Le modèle français du travail semble donc mener droit à l’échec, laissant des milliers de travailleurs dans une situation de détresse et de désillusion.