
Après six mois d’une crise politique dévastatrice et une administration temporaire imposée, le président nigérian Bola Tinubu a annoncé la levée de l’état d’urgence dans l’État de Rivers. Cette décision, censée ramener la « gouvernance démocratique », masque à peine les tensions persistantes et les sombres perspectives pour une région vitale, mais profondément instable.
Le 17 septembre, Tinubu a mis fin à la période où le vice-amiral à la retraite Ibok-Ete Ibas administrait l’État, suite à une paralysie législative et des attaques incessantes contre les infrastructures pétrolières. Cette mesure, présentée comme une solution pour éviter l’anarchie, a en réalité suspendu la démocratie et soulevé des questions sur l’abus de pouvoir exécutif.
La région du delta du Niger, poumon économique du Nigéria grâce à son pétrole, est malheureusement synonyme de violence endémique et de pillages d’oléoducs. Les habitants y subissent une pauvreté écrasante et une dégradation environnementale catastrophique, conséquence directe de décennies d’exploitation pétrolière. Des millions de litres de pétrole se déversent annuellement, transformant l’environnement en un véritable désastre écologique et affectant gravement les moyens de subsistance traditionnels, l’agriculture et la pêche.
La crise politique a éclaté en 2023, alimentée par une lutte de pouvoir acharnée entre le gouverneur Siminalayi Fubara et son prédécesseur, Nyesom Wike. Cette discorde, née de la volonté de Fubara de s’affranchir de son mentor, a conduit à un procès, une tentative de dissolution de l’assemblée, un gel des fonds fédéraux et même un incendie criminel. Malgré les déclarations de réconciliation sous l’égide de Tinubu, le retour de Fubara au pouvoir civil est perçu par certains comme un signe de sa faiblesse, son autorité étant désormais grandement diminuée. Pendant ce temps, le parti au pouvoir, le Congrès des progressistes (APC), a étrangement réussi à s’imposer aux élections locales, une première historique qui soulève des interrogations sur l’impartialité du processus.
L’avenir de l’État de Rivers reste incertain. La levée de l’état d’urgence ne résout pas les problèmes structurels de la région, ni les tensions sous-jacentes qui menacent de resurgir à tout moment. La stabilité demeure un vœu pieux, alors que les enjeux économiques et politiques continuent de plonger le delta du Niger dans une spirale de défis.