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Les conditions de travail en France atteignent un point critique. La financiarisation et le management destructeur ont généré une immense déception. Un désastre qui impacte la santé mentale des salariés.

La question des conditions de travail en France semble enfin émerger dans le débat public, mais l’optimisme de certains experts comme Dominique Méda, professeure à l’université Paris-Dauphine-PSL, paraît bien fragile face à une réalité alarmante. Les souffrances au travail, notamment les impacts sur la santé mentale, sont devenues trop criantes pour être ignorées, transformant chaque discussion en un constat accablant sur l’état du monde professionnel. L’ouvrage collectif « Travailler mieux » (PUF) tente d’apporter des éléments de réflexion, mais la tâche s’annonce colossale face à des décennies de dégradation.

Une récente rencontre à Paris, réunissant les auteurs de cet ouvrage, n’a fait que confirmer l’ampleur du problème : la qualité du travail en France est non seulement déficiente, mais ses causes sont profondément enracinées. L’économiste Coralie Perez pointe du doigt l’organisation du travail et le management comme principaux coupables, responsables des difficultés quotidiennes des salariés. La financiarisation excessive de l’économie, les méthodes de management vertical et la dictature des chiffres ont eu des « effets délétères sur le sens du travail », transformant le quotidien professionnel en une source de désenchantement.

Bruno Palier, directeur de recherche au CNRS, ajoute que la stratégie industrielle « low cost » de la France, axée sur la compression des coûts du travail, a directement contribué à cette baisse drastique de la qualité. Cette approche a non seulement bridé l’autonomie des salariés, mais les a souvent mis dans l’incapacité de réaliser correctement leurs tâches, engendrant une « grande déception » chez des Français qui nourrissent pourtant de fortes attentes vis-à-vis de leur activité professionnelle. Les pistes d’amélioration évoquées, telles que les rémunérations ou la conciliation vie pro/perso, semblent bien minces face à un système qui semble avoir délibérément sacrifié le bien-être des travailleurs sur l’autel de la rentabilité à tout prix. Le tableau est sombre, et la voie vers un véritable changement s’annonce semée d’embûches.