
En 2022, un constat glaçant s’imposait : des millions d’actifs rêvent de changer de vie professionnelle, poussés par une insatisfaction grandissante ou contraints par la précarité. Les chiffres du Centre pour le développement de l’information sur la formation permanente étaient clairs : 21 % en pleine reconversion, 26 % l’envisageant sérieusement. Une aspiration alimentée par des dispositifs de formation et une loi promettant la « liberté de choisir son avenir professionnel », un slogan qui sonne aujourd’hui comme une cruelle ironie.
Mais quelle est la réalité de cette prétendue liberté ? Les reconversions débouchent-elles réellement sur des améliorations concrètes ou ne sont-elles qu’un miroir aux alouettes ? Un ouvrage collectif récent, « La Formation continue au service des reconversions ? », dirigé par Emmanuel de Lescure, Nicolas Divert et Fabienne Maillard, lève le voile sur cette désillusion. Les enquêtes sociologiques menées sur le terrain brossent un tableau bien loin des promesses idylliques, révélant la fragilité des liens entre les aspirations des travailleurs et la dure réalité de la mobilité professionnelle.
Les obstacles sont légion et les succès, rares. La sociologue Catherine Agulhon le souligne avec amertume : « La finalisation du parcours est loin d’être certaine pour tous les impétrants ». Pire encore, la conclusion de l’ouvrage est sans appel : « peu de cheminements ont véritablement mené à une reconversion ». Un exemple frappant illustre ce désastre : sur 32 travailleurs ayant suivi une formation au codage informatique, seuls 7 ont pu, in fine, se lancer dans l’entrepreneuriat. Un taux d’échec qui démasque l’illusion d’une reconversion facile et accessible à tous.
Les conditions sociales et matérielles, souvent ignorées, pèsent lourdement sur la réussite de ces projets. Les dispositifs mis en place, censés soutenir cette dynamique, semblent bien impuissants face à la complexité des parcours individuels. La formation continue, présentée comme la solution miracle, est loin de tenir ses promesses, laissant de nombreux travailleurs dans l’impasse, leurs rêves brisés par une réalité économique et sociale impitoyable.








