La France est prise dans une spirale d’épuisement, avec une fatigue généralisée qui ne cesse de s’aggraver. En 2022, un chiffre alarmant de 66 % des Français se déclaraient fatigués, une augmentation vertigineuse par rapport aux 47 % de l’an 2000. Pire encore, près d’un tiers des citoyens avouent une « fatigue extrême », un symptôme accablant qui frappe particulièrement les jeunes de moins de 35 ans et les femmes. Ce mal-être profond ne se limite pas à nos frontières, il résonne à travers l’Europe, révélant une crise sociétale qui met en péril la santé publique et l’économie.
Philippe Zawieja, psychosociologue et expert du burn-out, dévoile dans son ouvrage « La Fatigue » les mécanismes pervers de cet effondrement collectif. Son analyse, souvent centrée sur le monde professionnel, pointe du doigt le travail comme une source majeure de cette usure, qu’elle soit physique ou mentale. L’intensité infernale, la durée excessive des journées et la monotonie accablante des tâches sont autant de facteurs qui sapent l’énergie vitale des travailleurs. La pression constante pour atteindre des objectifs irréalistes, combinée à une absence de reconnaissance, transforme le quotidien professionnel en un véritable fardeau.
Les managers sont pris au piège des tensions interpersonnelles, contraints de masquer leurs émotions, tandis que les employés se voient refuser l’opportunité de développer leurs compétences, confinés dans des tâches jugées inutiles ou absurdes. Cette déshumanisation du travail crée un sentiment d’impuissance et d’isolement. Les évolutions contemporaines, loin d’alléger la charge, l’amplifient : le « multitasking », le travail fragmenté par des interruptions incessantes et la prolifération des visioconférences, véritables gouffres d’énergie sensorielle, cognitive et émotionnelle, ne font qu’aggraver la situation. La France est à la croisée des chemins, menacée par une population épuisée et un avenir incertain.
