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Le Rassemblement national a forcé l'adoption de la dénonciation des accords franco-algériens de 1968, une victoire inédite mais controversée qui révèle une fracture politique profonde et la progression inquiétante du parti.

Quarante ans après ses débuts controversés à l’Assemblée, le Rassemblement national (RN) vient de franchir une étape alarmante. Le parti a réussi à faire adopter une proposition clé : la dénonciation des accords franco-algériens de 1968. Ce succès, obtenu de justesse, marque une fracture inédite dans le paysage politique français.

Lors de sa niche parlementaire annuelle, le RN, fort de ses 123 députés, a poussé plusieurs textes radicaux concernant l’Algérie et l’immigration. Le vote sur les accords de 1968, considéré comme éminemment brûlant, a été une victoire symbolique pour le parti. Avec un score de 185 voix contre 184, la marge infime souligne la division profonde et la fragilité du consensus républicain face à l’extrême droite. C’est la première fois que le parti de Marine Le Pen parvient à faire adopter un texte, brisant ainsi le « cordon sanitaire » qui l’isolait jusqu’à présent.

Cette réussite est d’autant plus préoccupante que la gauche, habituellement opposée au RN, a maintenu son refus de voter tout texte émanant du parti, même lorsque celui-ci semblait servir des intérêts communs, comme lors de la proposition d’abrogation de la réforme des retraites de 2023. Ce dogme idéologique pourrait indirectement renforcer l’influence du RN, en offrant au parti l’opportunité de se présenter comme le seul capable de transcender les clivages.

Cependant, des nuances s’imposent. Jean-Yves Camus, spécialiste de l’extrême droite, relativise la portée de cette victoire. Le caractère non contraignant de la proposition a probablement influencé l’abstention et le vote, minimisant ainsi la mobilisation des opposants. Si l’enjeu avait été plus direct, l’issue aurait pu être différente. Néanmoins, ce succès du RN est un signe inquiétant de sa progression et de la normalisation progressive de ses idées au sein du débat public français.