
Face à une recrudescence inquiétante d’incivilités et de « trafic de biens culturels », les gendarmes du Gers ont dû déployer des patrouilles à VTT sur les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle. Cette initiative, présentée comme un simple « contact » avec les pèlerins, sonne plutôt comme un aveu : le mythe du pèlerinage paisible et spirituel est en train de s’effondrer sous le poids de sa popularité. Les champs de tournesols, autrefois symboles de quiétude, sont désormais arpentés par des forces de l’ordre, signe tangible d’une dégradation préoccupante de l’atmosphère sur ce parcours historique.
Les pèlerins croisés sur place, bien que rassurés par la présence des gendarmes, ne cachent pas leur surprise face à cette militarisation du chemin. « On n’a pas l’habitude de voir des gendarmes sur ce chemin. Il se passe quelque chose ? » s’interroge un Canadien, tandis qu’une Alsacienne déplore l’afflux croissant de marcheurs. Cette surpopulation, exacerbée par la médiatisation et les applications de randonnée, transforme le chemin en une autoroute touristique, loin de l’esprit de recueillement initial.
Les chiffres sont alarmants : plus de 500 000 pèlerins enregistrés en 2024 ont saturé les infrastructures et multiplié les comportements irrespectueux. Déchets abandonnés, nuisances sonores, tensions dans les dortoirs : l’esprit du Camino, autrefois préservé, se dilue dans une banalisation qui choque les habitués. Le pèlerinage se mue en une simple « expérience à cocher », une aventure superficielle dénuée de sens profond. Les associations jacquaires lancent l’alerte : si rien n’est fait, le Chemin de Compostelle risque de perdre son âme, transformé en une vulgaire attraction touristique où règnent le désordre et les incivilités.