
La réputation déjà sulfureuse de Shein, le mastodonte chinois de la fast-fashion, vient de chuter encore plus bas. Accusée de longue date de concurrence déloyale, de pratiques environnementales désastreuses et de conditions de travail précaires, la plateforme est désormais éclaboussée par une affaire d’une gravité inouïe : la mise en vente de poupées à caractère pédopornographique. Un nouveau dérapage qui souligne l’incapacité des régulations actuelles à endiguer les dérives des géants du e-commerce.
Il a fallu une intervention de la DGCCRF pour que Shein retire enfin ces produits choquants. Une réaction tardive, forcée par la menace d’une interdiction pure et simple en France, émise par le ministre de l’Économie Roland Lescure. AliExpress est également sous le coup d’une enquête pour des faits similaires, illustrant l’ampleur du problème. Mais cette « promptitude » forcée ne suffit pas à masquer les failles béantes du système de contrôle.
Le malaise persiste : comment un pays peut-il se protéger efficacement contre de telles infractions ? La directive européenne sur l’e-commerce et le Digital Services Act (DSA), censés encadrer l’activité des plateformes, montrent leurs limites. Shein, en tant que simple « place de marché », se décharge de toute responsabilité a priori sur le contenu vendu par ses marchands tiers. L’obligation de diligence n’intervient qu’une fois le scandale éclaté, après que le mal est déjà fait. Les procédures pour bloquer des sites sont lentes et facilement contournables via des VPN, rendant les actions des autorités quasi impuissantes.
Face à des plateformes qui brassent des milliards et des millions de références, les quelques dizaines de fonctionnaires de la DGCCRF sont dépassés. Sans une obligation ferme pour ces géants d’exercer un contrôle préventif sur leurs contenus, les affaires comme celle des poupées Shein sont malheureusement vouées à se répéter. Les moyens techniques et financiers sont là, mais la volonté politique et la pression réglementaire semblent cruellement manquer pour forcer ces acteurs à assumer pleinement leurs responsabilités. Le précédent d’Amazon, rappelé à l’ordre pour des produits similaires sans aucune poursuite pénale en 2020, ne fait qu’accentuer le sentiment d’impunité.






