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Malgré un revers constitutionnel, Laurent Nuñez, le ministre de l'Intérieur, s'entête à vouloir allonger la rétention des étrangers jugés dangereux de 90 à 210 jours. Une décision controversée qui interroge sur l'équilibre des pouvoirs et l'efficacité réelle de la mesure.

Face à l’indignation publique et une insécurité croissante, le ministre de l’Intérieur, Laurent Nuñez, s’accroche à une réforme controversée. Il persiste à vouloir prolonger la durée de rétention administrative des étrangers jugés dangereux, passant de 90 à 210 jours. Cette décision intervient après un cinglant revers essuyé en août, lorsque le Conseil constitutionnel a retoqué une grande partie du texte précédent. Une manœuvre qui soulève des questions sur l’équilibre entre sécurité et droits fondamentaux.

Le Conseil constitutionnel avait jugé l’allongement initial de la rétention, de trois à sept mois, disproportionné et non conforme aux exigences constitutionnelles. Cette durée n’était jusqu’alors applicable qu’aux individus condamnés pour terrorisme. Désormais, le gouvernement souhaite l’étendre aux étrangers en situation irrégulière, même ceux qui n’ont pas encore été définitivement condamnés. Une ambition qui ne manque pas de provoquer des remous quant aux garanties de la liberté individuelle.

Laurent Nuñez affirme que l’article censuré a été réécrit pour se conformer aux exigences des « Sages ». Mais la rhétorique gouvernementale, qui met en avant la menace de « certains faits graves ou présentant une menace d’une particulière gravité à l’ordre public » pour justifier cette mesure, laisse transparaître une volonté de contourner les obstacles juridiques plutôt que de les respecter pleinement. Le précédent ministre, Bruno Retailleau, avait déjà promis une nouvelle mouture du texte, dans un éternel bras de fer entre le pouvoir exécutif et l’autorité judiciaire.

Alors que le député Charles Rodwell s’apprête à déposer cette nouvelle proposition de loi, l’opinion publique reste divisée. Beaucoup s’inquiètent de voir des individus jugés dangereux remis en liberté faute de pouvoir être expulsés. Cependant, la prolongation de la rétention administrative pose la question de l’efficacité réelle de ces mesures. Est-ce une solution pérenne ou un simple pansement sur une plaie béante, ignorant les problèmes diplomatiques et consulaires qui entravent les expulsions effectives ? Le spectre d’une justice à deux vitesses, où la nationalité primerait sur les principes fondamentaux, continue de planer.