
Cinquante ans après la mort du dictateur Francisco Franco, un phénomène alarmant prend de l’ampleur en Espagne : une part significative de la jeunesse semble manifester une indulgence troublante à l’égard du franquisme. Alors que le pays s’efforce de panser les plaies d’un passé sombre, des voix juvéniles réécrivent l’histoire, minimisant les atrocités d’une dictature brutale et soulignant de prétendus aspects positifs du régime.
Interrogés, certains lycéens n’hésitent pas à louer la période franquiste pour ses « réalisations » en matière d’infrastructures, évoquant la construction de barrages, d’aéroports et de chemins de fer. D’autres, avec une naïveté déconcertante, parlent même de la Sécurité sociale comme d’un bienfait du général Franco, ignorant les répressions féroces et l’absence totale de libertés publiques. Ce discours alarmant, souvent véhiculé par les réseaux sociaux et favorisé par un enseignement lacunaire de l’histoire, résonne de plus en plus dans les établissements scolaires espagnols.
Cette réinterprétation du passé n’est pas sans lien avec la montée en puissance de partis d’extrême droite comme Vox, qui séduisent une partie de cette jeunesse en quête de repères et de réponses. Vox, dont les détracteurs pointent la nostalgie du franquisme, a d’ailleurs vu sa popularité croître chez les jeunes de 18 à 29 ans.
L’idéalisation d’un passé d’« ordre et de prospérité » sous Franco omet sciemment que cet ordre reposait sur une subordination légale de la moitié de la population et une répression systématique des opposants. Ce « déficit d’enseignement » et cette manipulation historique menacent la mémoire démocratique de l’Espagne, risquant de rouvrir des blessures que beaucoup espéraient enfin refermées. Le « pacte d’oubli » tacitement adopté lors de la transition démocratique montre aujourd’hui ses limites, laissant la porte ouverte à une réhabilitation dangereuse d’une dictature meurtrière.






