Irak-Mosul-refugee-camp
Le ralliement d'un étudiant irakien à l'État islamique en 2014 a plongé sa famille dans un enfer de rejet et d'humiliation, même des années après la chute du califat.

La décision fatale de Wadhban Massar Madjid, un étudiant irakien de 28 ans, de rallier l’État islamique (EI) en 2014, a plongé sa famille dans un calvaire sans fin. Onze ans après ce ralliement tragique, les proches de l’ancien djihadiste sont toujours des parias, ballottés entre les zones de guerre d’Irak et les camps de réfugiés syriens, victimes d’une société qui les ostracise sans pitié. « Depuis que mon frère a rejoint l’État islamique, toute la famille est associée à l’EI », déplore Qadissa Massar Madjid, 35 ans. Cette association forcée à une organisation terroriste a irrémédiablement brisé leurs vies, les condamnant à une errance misérable et une stigmatisation insupportable.

En août 2024, après des années d’humiliations, Qadissa et sa fille de 7 ans, accompagnées de trois de ses sœurs, d’une belle-sœur et de leurs enfants, ont trouvé un refuge de fortune en lisière de Mossoul. Cette fuite désespérée fait suite à une situation inextricable : sans garant, elles étaient bloquées dans le camp de réhabilitation d’Al-Jadaa, destiné aux familles de djihadistes. Le retour à Sayyed Gharib, leur village d’origine, est impossible, leurs maisons étant détruites et la région occupée par la milice chiite Saraya al-Salam, qui leur interdit l’accès. Un chauffeur providentiel, Tarek Fadel, rencontré devant le camp, leur a offert sa protection et un toit, un maigre répit dans cette spirale infernale.

Cependant, ce bref sursis est vite éclipsé par la haine persistante des habitants. Les voisins ont accueilli la famille avec des jets de pierre, et « même les enfants sont insultés dans la rue », témoigne Tarek Fadel, qui a épousé l’une des sœurs. Les humiliations se poursuivent lors des convocations à la sûreté nationale, où ils subissent insultes et mépris. Huit ans après la chute du califat autoproclamé de l’EI, la haine tenace envers ceux qui ont semé la terreur persiste, et la famille de Wadhban Massar Madjid en paie le prix fort, condamnée à une existence de rejet et de souffrance, symbolisant l’échec profond de la réconciliation en Irak.