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Les États-Unis ont retiré le président syrien Ahmed al-Charaa de leur liste noire terroriste, une décision controversée avant sa visite à la Maison-Blanche. Un revirement inquiétant.

Dans une décision qui défie toute logique et soulève de vives inquiétudes, les États-Unis ont officiellement retiré le président syrien par intérim, Ahmed al-Charaa, de leur liste des personnalités considérées comme terroristes. Cette annonce, qualifiée de « symbolique », intervient à quelques jours de sa visite historique et controversée à la Maison-Blanche, marquant une capitulation diplomatique face à un passé des plus sombres.

Le dirigeant, dont les liens avec des groupes jihadistes sont bien documentés – il a notamment dirigé Hayat Tahrir al-Sham, autrefois affilié à Al-Qaïda – sera reçu par Donald Trump lundi. Une consécration amère pour celui qui, en moins d’un an, a sorti son pays de l’isolement international, laissant planer un doute sur les véritables intentions de Washington.

Le ministère américain des Affaires étrangères a justifié ce revirement par les « progrès accomplis » par les dirigeants syriens après le départ de Bachar al-Assad, ainsi que par les engagements d’Al-Charaa en matière de lutte contre le terrorisme et le trafic de drogue. Des promesses bien minces face à un héritage de violence et de répression. Ce nouveau gouvernement, pourtant dirigé par un ancien jihadiste avec une prime de 10 millions de dollars sur sa tête il y a encore un an, est désormais présenté comme un acteur clé de la « sécurité et la stabilité régionales ».

Jeudi, le Conseil de sécurité de l’ONU avait déjà levé, sous l’impulsion américaine, les sanctions contre Ahmed al-Charaa, lui ouvrant ainsi les portes de la scène internationale. C’est une dangereuse normalisation d’un régime syrien dont les cicatrices de la guerre civile sont encore béantes. L’empressement d’Ahmed al-Charaa à se présenter comme un réformateur, multipliant les ouvertures vers l’Occident et les monarchies arabes, et même engageant des négociations avec Israël, ne masque qu’imparfaitement les risques profonds d’une telle alliance.

Cette visite n’est pas la première sur le sol américain pour Al-Charaa, qui s’était déjà exprimé à l’Assemblée générale de l’ONU en septembre. Une progression fulgurante et dérangeante pour un homme dont le passé entache gravement toute prétention à la respectabilité, et dont l’acceptation par les grandes puissances occidentales envoie un signal alarmant sur les compromis faits au nom de la realpolitik.