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Le procès de l'ex-soldat du Bloody Sunday à Belfast rouvre de vieilles plaies. Une justice lente et défaillante pour les victimes du massacre de 1972.

Cinquante-trois ans après le tristement célèbre Bloody Sunday, le procès d’un ex-soldat britannique, surnommé « soldat F », pour deux meurtres et cinq tentatives de meurtre s’ouvre enfin à Belfast, une mascarade de justice tardive pour les victimes de ce massacre ignoble. Un événement qui a marqué l’un des chapitres les plus sanglants du conflit nord-irlandais, où des parachutistes britanniques ont lâchement tiré sur des manifestants catholiques, causant la mort de 13 innocents. Il est révoltant de constater qu’aucun militaire n’ait été jugé jusqu’à présent pour ce « dimanche sanglant ».

Pendant des décennies, l’armée britannique a tenté de justifier l’injustifiable, affirmant que ses troupes ripostaient à des tirs de « terroristes » de l’IRA. Une version mensongère, étayée par un rapport bâclé, balayée par d’innombrables témoignages. Il a fallu attendre 2010 pour que l’innocence des victimes, abattues parfois dans le dos ou à terre, soit enfin officiellement reconnue. Une reconnaissance qui arrive bien trop tard pour apaiser la douleur des familles.

Le « soldat F », jugé pour les meurtres de James Wray et William McKinney, ainsi que cinq tentatives de meurtre, a plaidé non coupable, son identité protégée par un rideau et son anonymat garanti tout au long du procès. Une protection scandaleuse pour un homme accusé de tels actes, alors que les familles des victimes attendent depuis plus d’un demi-siècle une justice qui semble toujours leur échapper.

Ce massacre, qui a conduit de nombreux jeunes catholiques républicains à rejoindre l’IRA, reste une tache indélébile dans l’histoire britannique et nord-irlandaise. Malgré les excuses tardives de David Cameron en 2010, qualifiant les faits d’« injustifiables », la justice reste lamentablement insuffisante. Seul un ancien soldat britannique a été condamné depuis la fin du conflit, et encore, à une peine avec sursis pour un tir « accidentel ». Le procès du « soldat F » ne fait que rappeler la lenteur et les lacunes d’un système incapable de rendre pleinement justice aux victimes du Bloody Sunday.