
Un silence macabre pèse sur les marais de Loire-Atlantique. Ce qui était autrefois un paradis verdoyant s’est transformé en véritable charnier, où des centaines, voire des milliers de cadavres d’oiseaux s’entassent dans une indifférence glaçante. La cause ? Une épizootie dévastatrice de botulisme aviaire, exacerbée par des chaleurs insupportables et une sécheresse persistante. Les chiffres sont terrifiants : plus de 3 000 oiseaux déjà fauchés rien qu’en Loire-Atlantique, un bilan qui s’alourdit quotidiennement. Le lac de Grand-Lieu, tout comme le marais de Brière, sont les épicentres de cette catastrophe écologique.
Les bénévoles, chasseurs et pêcheurs, sont les seuls remparts face à cette hécatombe, arpentant les zones humides pour collecter les victimes de cette maladie sournoise. Armés de bottes et de gants, ils extraient les corps sans vie de ce qui fut un écosystème vibrant, désormais plongé dans une quiétude mortelle. Frédéric Richeux, président de l’Union des chasseurs de gibier d’eau de Grande Brière, témoigne de son désarroi : « Au mois de juillet, on devrait avoir des oiseaux qui volent, qui chantent. Là, c’est le silence, c’est mortifère. »
Cette ampleur de mortalité, inédite depuis 1995, met en lumière la fragilité de nos écosystèmes face aux dérèglements climatiques. Le botulisme, provoqué par une bactérie proliférant dans les eaux stagnantes et chaudes, paralyse progressivement les oiseaux, les condamnant à une agonie certaine. L’Anses, l’Agence nationale de sécurité sanitaire, qualifie cette maladie de la plus meurtrière pour les oiseaux d’eau à l’échelle mondiale. Le risque de propagation est d’autant plus grand que les asticots se nourrissant des carcasses contaminées deviennent eux-mêmes des vecteurs de la toxine, créant un cycle infernal de contamination.
Malgré les efforts de ramassage, la situation demeure critique. Le directeur de la réserve nationale du lac de Grand-Lieu, Jean-Marc Gillier, déplore un « succès assez mitigé », face à un périmètre de contamination alarmant. Les appels à un « électrochoc » et à une « vraie gestion hydraulique » se multiplient, dénonçant une politique de l’eau inadaptée et des conflits d’usage entre agriculture et préservation environnementale. L’État, décidément trop lent à réagir, peine à fournir les moyens nécessaires à cette crise d’une ampleur sans précédent.