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Une collection de manuscrits inédits de Marcel Proust refait surface, révélant un trésor longtemps ignoré et soulevant des questions sur la gestion de notre patrimoine littéraire. Une découverte amère.

Dans le monde feutré des enchères et des institutions culturelles, une découverte inattendue a récemment jeté une ombre sur l’héritage de Marcel Proust. Une collection de manuscrits inédits, présentée avec grandiloquence par la Bibliothèque nationale de France (BNF) et Sotheby’s, a été dévoilée le 17 septembre 2025. L’événement, censé célébrer un trésor littéraire, révèle en réalité les lacunes et les surprises amères de la conservation patrimoniale.

Marie de Laubier, directrice des collections de la BNF, se souvient avec une émotion à peine dissimulée de l’e-mail énigmatique reçu en juin 2024. Une invitation à examiner des « documents importants », sans plus de détails. Ce secret initial, bien que teinté de mystère, souligne l’opacité qui entoure souvent ces découvertes majeures. Quelques jours plus tard, face à une table débordante de manuscrits de la main de Proust, le choc fut « vertigineux ». Le fait qu’un fonds d’une telle ampleur – pas moins de 900 lots – puisse encore surgir en 2024 est moins une prouesse qu’une remise en question de la manière dont les œuvres sont gérées et cataloguées.

Anne Heilbronn, vice-présidente de Sotheby’s, ne fut pas moins « subjuguée » par l’ampleur de cette découverte « hors-norme ». Elle fut la première contactée par les héritiers, dont l’identité demeure confidentielle, de Suzy Mante-Proust (1903-1986), la nièce de l’écrivain. C’est en 2019 que ce fonds fut exhumé, mais il aura fallu des années pour qu’il parvienne à la lumière, soulevant des interrogations sur la lenteur des processus et les raisons de cette longue gestation. Derrière l’émerveillement affiché, se cache une réalité plus sombre : celle des documents précieux qui dorment, ignorés, attendant un coup de chance ou une initiative privée pour être enfin reconnus.