
La rentrée littéraire, avec ses 484 nouveaux romans, se présente comme une façade scintillante masquant une réalité bien plus sombre pour le secteur de l’édition française. Derrière cette avalanche de nouveautés, se cache un malaise social et économique profondément enraciné. Les chiffres sont sans appel : le marché du livre a dégringolé de 0,8 %, atteignant péniblement 2,28 milliards d’euros entre janvier et fin août, d’après les constats alarmants de l’institut Nielsen GFK. Pire encore, si l’on exclut le phénomène éphémère et surprenant des titres de Freida McFadden, la chute s’accentue dramatiquement à 2,7 %. C’est un signal clair d’un secteur en pleine déroute.
La décision controversée de réduire le crédit individuel du Pass culture, accordé aux jeunes, a agi comme un véritable couperet, asphyxiant les ventes de livres et privant les nouvelles générations d’un accès facilité à la lecture. Catherine Lucet, directrice générale d’Editis, ne mâche pas ses mots, évoquant un « retour de bâton violent » dans des secteurs autrefois florissants comme la romance et la bande dessinée. Elle pointe également du doigt les « difficultés de l’édition scolaire », un pilier essentiel qui vacille. Et comme si cela ne suffisait pas, l’ombre grandissante des « faux livres développés par intelligence artificielle », particulièrement dans l’édition jeunesse, ajoute une couche d’incertitude et de précarité pour l’avenir du livre.
Face à ce tableau désastreux, les éditeurs n’ont d’autre choix que de multiplier les mesures drastiques de réduction des coûts. C’est dans ce contexte de crise que des géants comme Editis (sous l’égide de CMI, groupe de Daniel Kretinsky), Hatier (Hachette Livres, détenu par Vivendi et Vincent Bolloré) et Bayard (propriété des augustins de l’Assomption) ont procédé à des déménagements massifs, symboles d’une restructuration forcée et douloureuse. Ces manœuvres, loin d’être anodines, témoignent d’une industrie à la recherche désespérée de solutions face à une crise qui ne cesse de s’aggraver.






