
Il aura fallu attendre 2015 pour que les égoutiers parisiens soient contraints de porter un masque filtrant, et 2020 pour un masque intégral. Un simple casque en 1984, un détecteur de gaz en 2007… L’évolution de la sécurité pour cette profession à haut risque semble d’une lenteur sidérante. L’exposition « Habits d’égoutiers » au Musée des égouts de Paris révèle des clichés accablants : dans les années 60, des hommes s’échinaient dans l’obscurité des eaux usées, leurs seuls équipements étant des bottes et quelques bandelettes. Une situation qui frôle l’indécence pour une ville comme Paris.
Le travail essentiel de ces hommes, inspecter, réparer et nettoyer les réseaux souterrains, n’a pas fondamentalement changé, mais leurs effectifs, eux, ont dramatiquement chuté. De plus d’un millier autrefois, ils ne sont plus que 260 à la Ville de Paris. Une baisse attribuée à la mécanisation, mais aussi, et c’est là le véritable scandale, à l’externalisation croissante. Julien Devaux de la CGT-FTDNEEA déplore cette tendance, soulignant la précarisation potentielle qu’elle engendre pour ces travailleurs de l’ombre.
Difficile d’évaluer le nombre réel d’égoutiers en France, tant le système est fragmenté entre fonctionnaires et sous-traitants. Si Paris bénéficie d’un réseau haussmannien entièrement visitable, ce qui justifie des effectifs plus importants, la situation ailleurs reste opaque. Antoine Guillou, adjoint à la maire de Paris, tente de rassurer en affirmant que l’accidentologie a diminué grâce aux équipements. Pourtant, il concède un « taux d’absence plus élevé » que dans d’autres professions, un euphémisme qui masque probablement des conditions de travail toujours difficiles et des impacts sur la santé à long terme. La modernisation cache-t-elle une dégradation sociale ?






