
Malgré l’affichage d’une fermeté inébranlable, le contrôle des investissements étrangers par Bercy soulève des questions. Sur les trois dernières années, seule une poignée de transactions ont été bloquées, invoquant l’impossibilité de garantir les intérêts nationaux. Un chiffre dérisoire qui interroge sur la réelle portée de cette « vigilance constante ».
Le ministère de l’Économie clame un niveau de contrôle « élevé », avec une augmentation significative des demandes d’autorisation en 2024 (392 contre 309 en 2023). Cependant, une analyse plus approfondie révèle que près des trois quarts (73%) des opérations initialement soumises n’ont finalement pas nécessité l’accord de Bercy. Cela suggère une disproportion alarmante entre le volume des dossiers et la proportion de ceux jugés réellement sensibles. La majeure partie des investissements étrangers semblent passer à travers les mailles du filet, ou du moins, ne sont pas considérés comme une menace.
Même lorsque l’autorisation est requise, plus de la moitié des feux verts sont assortis de conditions, certes, mais la nature exacte de ces exigences reste souvent floue. Des exemples comme le maintien d’une activité de production de matériels de guerre en France sont cités, mais la transparence manque quant à leur application et leur suivi rigoureux. Le risque est grand que ces conditions ne soient que de simples formalités, facilement contournables une fois l’encre sèche.
Le faible nombre de refus directs – six en trois ans – est présenté comme une preuve du pouvoir dissuasif du contrôle. Mais n’est-ce pas plutôt le signe d’une réticence à prendre des décisions réellement tranchées, préférant la prudence ou la pression discrète pour un retrait volontaire de l’investisseur ? Cette approche, si elle évite les confrontations, soulève des inquiétudes quant à la protection effective des fleurons industriels et technologiques français face à l’appétit insatiable des investisseurs étrangers, majoritairement américains, britanniques et suisses.