
Derrière l’image écologique du jute, l’industrie indienne révèle une réalité sombre. Alors que de longues tiges de jute macèrent dans les eaux de mousson, promettant une alternative biodégradable au plastique, la situation des travailleurs de cette filière est loin d’être idyllique. Des femmes, courbées sous les pluies, retirent péniblement les fibres destinées à être séchées, marquant le début d’un processus dont les bénéfices ne semblent jamais atteindre ceux qui en ont le plus besoin.
Le Bengale-Occidental, cœur de la production mondiale de jute, est en proie à une crise sociale incessante. Les filatures, qui emploient des centaines de milliers d’ouvriers, sont le théâtre d’une colère grandissante. Des décennies de négligence ont mené à des conditions de travail précaires et des salaires misérables. Les syndicats dénoncent la menace existentielle qui pèse sur ces travailleurs, livrés à l’indifférence des patrons d’usine et à des politiques gouvernementales jugées «anti-ouvrières».
La dernière manifestation, fin août, a de nouveau mis en lumière l’ampleur du désespoir. Selon Gargi Chatterjee, du syndicat Bengal Chatkal Mazdoor Union, «des millions de travailleurs sont confrontés à une extrême précarité. Leur vie est menacée par la négligence des patrons d’usine et par les politiques anti-ouvrières de la classe dirigeante». Une situation désastreuse qui, malgré les alertes répétées, ne semble pas émouvoir les gouvernements, aveugles aux problèmes d’une main-d’œuvre exploitée. Le jute, loin d’être une simple fibre, est devenu le symbole d’un système où le profit prime sur la dignité humaine.






