
Le très attendu projet de loi contre la vie chère, porté par Manuel Valls, ministre des Outre-mer, s’apprête à être présenté, mais l’optimisme est loin d’être de mise. Malgré vingt ans de tentatives législatives infructueuses, ce nouveau texte est censé apaiser la colère récurrente des populations ultramarines, confrontées à une inflation qui ne cesse de s’aggraver. Les chiffres sont accablants : selon l’Insee (2022), l’alimentation coûte en moyenne 30% à 42% plus cher outre-mer que dans l’Hexagone, et l’ensemble des biens affiche un surcoût de 9% à 16% . Pire encore, ces écarts, déjà abyssaux, continuent de se creuser, notamment sous l’impulsion des services.
En janvier 2025, la Guadeloupe a vu ses prix à la consommation grimper de 3% sur un an, là où la moyenne nationale stagnait à 1,7% . La Réunion n’est pas en reste : entre 2024 et 2025, l’alimentation y a bondi de 3,1% contre seulement 1,2% au niveau national . Une situation d’autant plus préoccupante que les territoires sont régulièrement frappés par des catastrophes naturelles, exacerbant une inflation déjà chronique. Huguette Bello, présidente de la région Réunion, a elle-même déploré que les « tensions inflationnistes sont devenues chroniques » .
Ce nouveau projet de loi, annoncé comme un « plan de bataille complet et structurel », vise officiellement à briser les monopoles, renforcer la concurrence et soutenir la production locale. Il prévoit un renforcement de l’Autorité de la concurrence et l’extension du Bouclier Qualité-Prix (BQP) . Cependant, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer l’insuffisance du texte, jugé par certains comme une attaque populiste contre les entreprises locales plutôt qu’une solution structurelle aux problèmes d’approvisionnement et de coûts d’importation . Les économies ultramarines, lourdement dépendantes des importations (jusqu’à 80% des produits alimentaires aux Antilles), sont prises dans un engrenage de prix élevés, héritage d’un modèle économique contestable . La question de l’octroi de mer, taxe locale contestée, ne fait qu’ajouter à la confusion et au poids sur le pouvoir d’achat des ménages . Sans une approche réellement novatrice, ce texte risque fort de n’être qu’un nouveau pansement sur une hémorragie économique et sociale.