
Les obsèques de Thierry Ardisson, célébrées ce jeudi à l’église Saint-Roch, marquent la fin d’une ère pour un animateur dont la passion pour une restauration monarchique n’aura jamais faibli, malgré les railleries et le scepticisme ambiant. Une lubie pour certains, une conviction profonde pour lui, ce désir d’un retour à la royauté a dominé une partie de sa carrière et de sa vie personnelle.
Louis de Bourbon, le prétendant au trône de France, a salué la « fidélité profonde » d’Ardisson à la tradition monarchique, un attachement qualifié de « valeurs intemporelles ». Ironie du sort, né un 6 juillet, « jour des Rois », l’animateur est décédé un 14 juillet, date symbolique de la prise de la Bastille, soulignant le caractère tragiquement prémonitoire de son destin. France 2, dans un geste discutable, n’a trouvé personne d’autre que Stéphane Bern pour animer la soirée hommage, confirmant une certaine vision, peut-être caricaturale, du personnage.
Dès 1986, sur le plateau d’Apostrophes, Ardisson affirmait sa préférence pour un roi plutôt que « Bernard Tapie président de la République », décontenançant un Bernard Pivot amusé et un Max Gallo condescendant. Son premier essai, « Louis XX, Contre-enquête sur la monarchie », vendu à près de 100 000 exemplaires, reste le point culminant de cette croisade. Il y voyait une monarchie parlementaire, modérée et libérale, loin des clichés véhiculés par l’Action française. Pour lui, la transmission dynastique garantissait le libéralisme et la démocratie, un argument qui sonne étrangement aujourd’hui face aux réalités politiques mondiales.
Sa lutte contre « deux cents ans de propagande républicaine » n’a jamais vraiment pris, prouvant que les idées révolutionnaires ont profondément enraciné le rejet de la monarchie dans l’esprit collectif. De « Bains de minuit » à « Tout le monde en parle », Ardisson a tenté de raviver la querelle entre Bourbons et Orléans, sans grand succès, les princes se retrouvant souvent pris au piège de blagues potaches. Son acceptation tardive de la Légion d’honneur en avril 2024, lui qui avait toujours refusé les honneurs de la République, apparaît comme une forme de renoncement à ses idéaux les plus profonds, une concession à une reconnaissance qu’il prétendait dédaigner.
Ardisson n’aura pas vu son rêve de reconstruction de la résidence royale des Tuileries se concrétiser, un projet à 300 millions d’euros jugé pharaonique et totalement irréaliste dans le climat politique et économique actuel. Ses obsèques, à cent mètres de ce palais jamais rebâti, symbolisent l’échec d’une vision, d’une utopie monarchique qui, pour beaucoup, est restée une simple nostalgie anachronique.