
Malgré l’urgence clamée par le Premier ministre Sébastien Lecornu, le projet de loi contre la « vie chère » en Outre-mer, adopté par le Sénat, est déjà perçu comme une déception amère. Jugé largement insuffisant par des parlementaires ultramarins frustrés, ce texte risquerait d’attiser la colère plutôt que de l’apaiser. Un constat alarmant alors que les territoires comme la Guadeloupe et la Martinique subissent des écarts de prix alimentaires pouvant atteindre 42% avec l’Hexagone, et une flambée de 35% en dix ans pour la Guadeloupe.
La sénatrice Micheline Jacques (LR) n’a pas mâché ses mots, qualifiant ce projet d’« outil de communication » et prédisant des « faux espoirs » générateurs de « d’amères déceptions ». De même, la sénatrice socialiste Catherine Conconne a fustigé une « loi-extincteur » qui ne parviendra pas à éteindre le « feu de la vie chère », car elle ignore le problème fondamental des revenus. L’ancien ministre Victorin Lurel a quant à lui déploré l’absence de financement gouvernemental.
Le gouvernement a fait le choix assumé de ne pas s’engager sur le terrain social et budgétaire, arguant que la question des revenus relève du long terme. Mais cette position fragilise un texte déjà contesté. Les sénateurs ont d’ailleurs supprimé des mesures phares, telles que l’exclusion des frais de transport du calcul du seuil de revente à perte, craignant qu’elle ne renforce la position dominante des grands distributeurs. La mise en place d’un mécanisme de péréquation pour réduire les frais d’approche a également été rejetée, le gouvernement refusant d’y associer l’État, provoquant même le « vrai désaccord de fond » du chef du groupe macroniste, François Patriat.
Face à ces reculs, la ministre Naïma Moutchou a concédé que le projet de loi risquait d’être « vidé de sa substance ». Seuls un renforcement du « bouclier qualité-prix » et la possibilité pour les préfets de réguler temporairement les prix en cas de crise ont été maintenus. En somme, un texte qui, malgré l’urgence proclamée, semble manquer cruellement d’ambition et risque de laisser les ultramarins face à une inflation persistante et une déception grandissante.






